L’ÉDITION INDÉPENDANTE UNIE FACE À LA PIEUVRE BOLLORÉ

« Ce qui est important, c’est la prise de conscience, et les actes en conséquence » Mathias Echenay, éditeur et fondateur des éditions La Volte.
Il est impossible d’ignorer aujourd’hui la main mise de Vincent Bolloré, sur les médias pour commencer, puis sur le monde de l’édition, pour continuer.
Une stratégie implacable, un objectif assumé; façonner la société à son image, à l’image des gagnants, des heureux de la compétition. Et les autres? Les autres, ils n’ont qu’à gagner!.
Il est plus que clair, qu’il s’agit donc d’appliquer sur la société le schéma d’une société conforme à une idéologie , d’éliminer toutes formes d’oppositions. Renforcer les gagnants, asseoir les privilèges d’une caste mercantile. Car ce monde là ne se conçoit qu’en termes de forts et faibles, dominés, dominants. Monsieur Propre débarque, muni de son karcher idéologique.
Face à cette hégémonie culturelle et sociale, un collectif de chercheurs, historiens, autrices, auteurs, éditrices, éditeurs, libraires, proposent de rendre possible l’existence pérenne d’une indispensable indépendance.. Toutes celles et ceux, qui font chaque jour la chaîne du livre, s’expriment dans ces pages. Elles et ils, pensent et agissent à partir d’un socle commun : sauver la diversité de l’édition indépendante, répondre aux questions urgentes qui se posent face aux dangers de cette concentration. Un livre, face à la puissance financière du groupe Vincent Bolloré. Un livre qui se poursuit dans les actes. Un livre qui ouvre la voie. A la résistance concrète, aux réflexions, aux rassemblements, aux actions. La multiplicité face à l’uniformité.
Les contributeurs analysent, chacun dans leurs domaines, les mécanismes d’absorption de cette concentration, l’expansion structurelle du groupe Bolloré. Face à ce « meilleur des mondes« , un monde où, rien n’a changé, ceux qui ont le pouvoir économique détiennent également la pouvoir culturel, ce collectif s’est organisé, a échangé des idées, des pistes, des propositions concrètes, et a publié ce livre « Déborder Bolloré« .
« Contre la concentration, il nous faut penser la dispersion« . Un livre, et une multitude de forces, d’entraides, de liens renforcés, de confiance en les capacités de celles et ceux qui ont fait le choix de l’indépendance.
« Dépasser la figure de Bolloré
Pour n’en citer que quelques uns , Antoine Pecqueur, Les Soulèvements de la terre, Clara Pacotte, Les éditions du bout de la ville, Amzat Boukabi-Yabara, Pascale Obolo…….
Pour Mathias Echenay éditeur et fondateur des éditions « La Volte » ,il s’agit de mettre l’accent sur la sensibilisation, la responsabilisation, la communication.
« Je pense qu’il faut une sensibilisation de chacun, à tous les niveaux, une prise de conscience et une responsabilité. De la part des libraires, des autrices et auteurs, des éditrices -éditeurs, nous devons optimiser les solidarités, sans pour autant tomber dans une pensée binaire. C’est un travail, une vigilance permanente de communication. D’engagements. Par exemple, je pense à des auteurs reconnus, qui dans leurs discours soutiennent le combat des éditeurs indépendants, mais qui ne prennent pas le risque de publier leurs livres chez ces derniers. Ce serait pourtant un signal fort pour les indépendants, un moyen concret de visibilité. Et pour les auteurs en question, une prise de risque proche du zéro. Je pense vraiment que ça passe par là, par la responsabilité de chacun, éditeurs, libraires, auteurs. Après, il existe des structures à tous les niveaux pour lutter. C’est le cas avec l’Association pour l’écologie du livre, avec la Fédération d’association des éditeurs, où beaucoup de réflexions et actions sont menées en commun. Parmi ces actions, on peut citer Olivier Legrain et sa Maison des Médias, qui ouvrira en 2026. Ce sera un regroupent de médias et éditeurs indépendants, qui auront accès à des locaux à des prix décents. C’est important, ça peut fortement aider à ne pas mettre la clé sous la porte! Moi, je crois fermement que faire chacun, à son niveau, localement, c’est l’une des solutions. Faire, avancer, creuser là où c’est possible…A la Volte, en dehors de nos publications et rencontres, on travaille avec « BLAST ». Nous avons crée « Planète B », une émission dédiée à la SF, le politique , l’imaginaire. C’est une manière de communiquer sur nos philosophies, de parler librement de dystopie, de surveillance, de contrôle, et d’encourager le collectif. Pour faire face à cette concentration si puissante, je crois vraiment que nous devons, chacun à notre niveau, veiller à réduire les interstices où se glisse un certain fascisme, et à nous unir. Librement. »

Mais comme le souligne Mathias Echenay, et bien d’autres, il ne s’agit pas de s’enfermer dans une personnification du problème de la concentration. Car si ce n’est Vincent Bolloré, ce sont donc ses frères, ses soeurs….
Jeux de rachats et législation.
Pour l’éditeur Florent Massot, la voie de la législation reste un moyen efficace pour progresser. « A mon avis, il n’y a pas eu d’avancée en France depuis les lois de 1986, sur la lutte contre la concentration de la presse. On a vu des tentatives, comme celle de Clémentine Autain, lors de la commission. Au niveau européen il y a eu une avancée, mais uniquement sur la liberté des médias, cela n’a concerné que l’audiovisuel et la presse. Je pense que l’édition doit s’inspirer de cela, jusqu’à présent elle n’est pas prise en compte. Mais cela doit s’établir sur un champ européen, pas uniquement français.
Avec ce livre « Déborder Bolloré« , nous avons réunis autour de nous cent vingt huit maisons d’éditions, je constate une énergie totale de la part de jeunes éditrices-eurs, ils prennent la relève! Tout cela est de bonne augure.
A l’instar de Mathias Echenay, Florent Massot souligne la nécessité de transparence » Sur la couverture des livres, il faudrait imprimer les noms des maisons rachetées par des « gros poisson », par exemple « Fayard/Hachette » ou « Minuit/Madrigal« .
Mathias Echenay soulève le débat avec une question à mi-chemin entre la philosophie et la finance; comment définir une maison d’édition indépendante? L’état d’esprit suffi-t-il ? A partir de quel moment, une maison d’édition indépendante peut-elle encore revendiquer cette indépendance, si son chiffre d’affaires atteint la taille d’une major? Et de citer Actes Sud, maison d’édition familiale, certes, mais du point de vue de son chiffre d’affaires et de son importance dans ce métier, peut-on encore la placer dans la même catégorie que celles et ceux qui repoussent le bulldozer Bolloré? . Où réside la frontière, entre édition indépendante et mastodonte de l’édition?
Mêmes échos, à peu de choses prés, du côté de la librairie « l’Affranchie« , à Lille, avec Soazic Courbet. Elle insiste sur l’importance de penser à une refonte globale et « d’arrêter de nourrir un système qui n’a pas pensé à ce métier de l’édition » Sa contribution dans ce livre est à lire attentivement, siouplaît. Soazic balance, par téléphone, pour le blog, et je retiendrais cette phrase, une recommandation, une synthèse, en quelque sorte » Il faut penser à la façon dont on fait commerce, et cela de manière collégiale. Et arrêtons de compter sur des subventions! »
Alors, n’attendez pas, débordez, débordez, débordez!!!
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